Hommage à Paul Niedermann, un ancien enfant d’Izieu

Hommage à Paul Niedermann, un ancien enfant d’Izieu

 

Nous apprenons avec beaucoup d’émotion le décès de Paul Niedermann, un ancien enfant d’Izieu.

Né en 1927 dans une famille victime de la déportation en France de toute la population juive du pays de Bade et du Palatinat par les nazis en octobre 1940, Paul avait ensuite subi durant de longs mois les persécutions antisémites de l’État français dans les camps d’internement de Gurs et Rivesaltes. Il fut soustrait à la déportation vers Auschwitz durant l’été 1942, de même que son frère Arnold, par Sabine Zlatin qui travaillait depuis Montpellier pour le réseau de sauvetage de l’Oeuvre de secours aux enfants. Mis à l’abri à Palavas-les-Flots, puis Lodève, il suivit le couple Zlatin à Izieu lors de la fondation de la « Colonie des enfants réfugiés de l’Hérault » au printemps 1943. Sauvé par le conseil d’un « bon gendarme » qui avait prévenu Miron Zlatin que la présence de ce jeune homme de 16 ans alimentait des suspicions autour de la colonie, il parvint à passer clandestinement en Suisse en septembre 1943 et échappa ainsi à la rafle du 6 avril 1944. Il revint vivre en France après 1945, témoigna au procès de K. Barbie en 1987 et présenta souvent à des élèves en France et en Allemagne son terrible parcours d’enfance.

 

Voici un extrait du témoignage qu’il a laissé de son passage à Izieu :

« Pour moi, cette maison d’Izieu ressemblait à un havre de paix, parce qu’on était vraiment loin du monde, on ne voyait personne, à part quelques paysans du hameau d’à côté. Théo riait beaucoup. J’ai eu relativement peu de contacts, notamment avec les petits. Par contre, ce qui reste dans mon esprit tout le temps, c’est le soir, sur les marches d’escalier, devant la maison, autour de la fontaine et sur la fameuse terrasse, où tant de photos ont été prises. On parlait de l’après-guerre, où on se rencontrerait, ce qu’on voudrait faire. Je dirai que j’ai relativement peu vu Mme Zlatin elle-même parce que, à cette époque, elle se déplaçait énormément pour les besoins de la cause. J’ai été beaucoup plus en contact avec son mari. Il a été vraiment un homme très gentil et moi, je pense qu’il était d’une grande bonté, et d’une énorme force physique.J’ai fait là la connaissance de Paulette Paillarès, qui était venue pendant ses vacances. Elle était lycéenne, elle avait un an de plus que moi, elle était venue passer des vacances à Izieu pour aider justement les moniteurs avec les petits. J’avais plutôt des contacts avec Paulette, avec Henry, avec Arnold et Théo, et nous étions les grands, nous étions un groupe à part.
Je me souviens aussi d’au moins deux fois dans l’été, des baignades dans le Rhône avec Léon Reifman, où il fallait descendre des kilomètres à travers les champs et on arrivait et… ma foi, il avait dû repérer des endroits parce que le Rhône, par endroits, c’est assez dangereux, il y a des trous, il y a des remous et il avait dû, je suppose, repérer ça très soigneusement parce que, bon, il n’est jamais rien arrivé. Dans les moniteurs personne ne parlait l’allemand et même le yiddish, et personne ne voulait le parler ; ils voulaient qu’on parle français. Et c’était bien.
On a parlé quelquefois de nos familles et là, c’était beaucoup plus pénible parce que moi, je savais par un ami polonais, depuis le mois de janvier 1943, que les gens avaient été déportés en Pologne et qu’on tuait là-bas. Je ne savais pas ni comment ni où, je n’avais jamais entendu parler d’Auschwitz ni de chambre à gaz ni de four crématoire, mais je savais qu’on tuait et je savais que je ne reverrais pas mes parents, qu’il n’y avait pratiquement aucune chance. »

Source : Témoignage de Paul Niedermann sur la Maison d’Izieu, transcription de la bande son « Les voix d’Izieu » diffusée dans la maison.

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